Une étude de l’INSEE met en lumière l’impact déterminant du milieu social sur la fracture numérique. Difficultés à l’écrit et illectronisme se renforcent mutuellement pour devenir un miroir des inégalités sociales.

L’illectronisme, ou l’incapacité à utiliser Internet et les outils numériques, n’est pas seulement une barrière technique, mais une manifestation flagrante des inégalités sociales. C’est ce que révèle une étude de l’INSEE parue le 22 avril. Selon cette étude, réalisée par Laïla Bentoudja de l’INSEE et Fabrice Murat de la DEPP, les personnes en difficulté face à l’écriture sont également celles qui peinent le plus à utiliser Internet et les outils numériques. Des difficultés exacerbées par le déterminisme social.

Lutte Quotidienne

Alors que près de 97 % de la population adulte utilise Internet, ce chiffre chute à 83 % pour ceux qui ont des difficultés en écriture. Ces difficultés ne se limitent pas à la simple navigation en ligne. Elles se traduisent également par des obstacles dans les démarches administratives courantes, avec seulement 61 % des personnes concernées ayant effectué des démarches par elles-mêmes, contre 85 % dans la population générale.

Pire encore, lorsque ces personnes tentent de franchir ces barrières numériques, elles le font souvent avec réticence. Seulement 42 % d’entre elles utilisent Internet pour effectuer des démarches administratives, comparé à une moyenne nationale de 79 %. Un quart des personnes en difficulté, à l’écrit, jugent qu’Internet complique les démarches administratives, soit 10 points de plus que pour l’ensemble de la population. La représentation qu’elles se font des démarches en ligne contribue à perpétuer ce cercle d’exclusion sociale et numérique.

Socialement déterminés

L’étude souligne également un lien étroit entre le niveau de scolarité et les compétences en écriture. Les personnes dont les parents sont peu ou pas diplômés sont beaucoup plus susceptibles de rencontrer des difficultés à l’écrit et en calcul que celles issus de milieux plus favorisés. 35 % des individus peu ou pas diplômés se trouvent en difficulté en écriture, tandis que cette proportion diminue considérablement parmi les diplômés du supérieur, où les difficultés deviennent marginales.

Le déterminisme social est un des catalyseurs de l’illectronisme et des difficultés à l’écrit qui y sont corrélées. L’étude met en exergue que l’influence du milieu social, familial et géographique :  19 % des personnes dont les parents sont peu ou pas diplômés sont en difficulté à l’écrit contre 3 % et 4% respectivement pour les personnes dont les parents sont titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur.

La fracture numérique n’est pas uniforme dans tout le pays. Elle est plus marquée dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) et les départements d’outre-mer (DOM-TOM), où le revenu moyen est plus bas. Un tiers des personnes résidant dans les QPV ont des difficultés à l’écrit, contre seulement 8 % hors QPV, et un habitant des DOM-TOM sur quatre est en difficulté à l’écrit, contre un sur dix en France métropolitaine. Cette situation est attribuable à la prévalence des personnes peu ou pas diplômées dans ces territoires.